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01. 2013 Y?a du boulot

#009  vendredi 3 février 2006

Marseille 2013, sud et archi sud

Dans l?espace dessiné où s?animent peu à peu les engins, où les pas de ceux qui ont laissé des traces ravivent nos mémoires, j?entends proclamer le temps des cultures : modernes et anciennes, primitives et contemporaines. Un vaste chantier ouvert sur l?horizon : Marseille 2013, capitale.

Au nord, les grues et les ports s?entremêlent. Chantiers ouverts et béants ; il fait chaud. La ville est enterrée comme une vieille cariatide. Les panneaux donnent à notre futur de drôles de directions. Ils s?amusent de toute cette complexité géographique. Les soleils vertigineux découpent les objets en toutes choses semblables. Noirs et blancs, sur fond bleu. Le mistral souffle abondamment à nos oreilles : culture, culture ; un vent venu du nord accéléré. Dés lors, une marche silencieuse se fait non loin de la mer...

Les pas dévorés les pas par les vestiges ; les petits pas ; étendus sur la sable. Pointes et crayons. Debout il est l?heure de marcher. Les pelleteuses de nos envies commencent alors une danse langoureuse, et avec elles, disparaissent nos ennuis. Marseille ville sud et archi sud.

Stéphane Torres

« Y'a du boulot »

La photo de DOOG nous invite en tant que spectateur à nous arrêter devant un chantier. Un lieu qui se situerait quelque part près du port autonome.
Le spectateur est comparable à l‘archéologue qui doit en premier photographier les vestiges, faire un instantané scientifique de l'endroit, une topographie pour établir un état des lieux. Par la photo, la mémoire du lieu s'opère.
Mais que découvre t'on ? Le travail à faire semble important ; il y a une indétermination sur le devenir du chantier lui-même. « Y a du boulot » mais par où commencer... celui qui regarde peut se poser suivante : « que vont-ils faire ici ? « un chantier de plus mais pourquoi faire ? » Le spectateur de la photo de Doog est invité à entreprendre un constat.
Le chantier se compose de références du monde des anciens (les grecs) et du monde contemporain en construction. La ville est elle-même en construction, elle laisse apparaître ses plaies, ses déchirures multiples comme après un tremblement de terre.
La photo symbolise l'état actuel de la ville, un chantier immense commencé il y a quelques années et qui doit durer encore quelques années. Pour DOOG la culture à Marseille est comparable à ce chantier. « y a du boulot »... Une note de pessimisme si l'on veut croire à l'ambition d'une capitale de la culture pour 2013. 2000 + Marseille = 2013. Une date symbolique pour un rendez-vous annoncé.
Pour l'archéologue il s'agirait d'une fouille mais pas pour le spectateur privilégié. Nous nous trouvons face à une résurrection en marche. Le chantier est un commencement. Il annonce un changement. Nous avons du mal à imaginer le résultat, la suite, l'avenir. Mais la seule présence d'un chantier donne l'idée d'un avenir possible. Les engins des travaux sont cachés, arrêtés. Qui pourra les mettre en marche ?
Il y a quelque chose ici qui fait référence à la tragédie. Le soleil frappe l'image d'une manière quasi zénithale. Nous avons l'impression que le temps est arrêté ? qu'il n'y a personne de présent sur les lieux. Le soleil frappe uniformément l'espace et sans laisser trainer d'ombres. La lumière donne à l'ensemble son ton de solennité. Le chantier est une vision sauvage où tout est en désordre mais le ton qui est donné par le traitement de la lumière est solennel.
Il y a les panneaux. Ce sont eux qui apportent une issue possible. Ils offrent des directions des avenirs. Notre destin est une suite de choix qui s'opèrent face à ces multiples potentiels de directions à prendre. Chantier près du port mais la mer n'est pas visible. Alors où devons nous aller ?
Les cariatides sont enlisées dans une lourdeur qu'on pourrait dire « quasi administrative ». Elles font parties des vestiges et du patrimoine. Elles tendent le bras comme pour demander une force extérieure. Qui aura la force de les extraire ?
La vision proprement culturelle est présente par l'affichage sauvage. Pour voir des annonces sur les spectacles il faut regarder les murs. Tout est affiché d'une manière sauvage. Les artistes qui sont déjà passés côtoient les publicités des artistes à venir ; du coup il est difficile se repérer ce chaos d'affichage sauvage. Mais doit-on se réjouir à la lecture des affiches des artistes présents ? Pas si sûr...Est-ce là, la culture ? Est-ce là, l'ambition d'une capitale ? « Y a du boulot... » ça c'est sûr...